Utiliser les composants CMS

. Par : Jean-Luc. URL : https://www.locoduino.org/spip.php?article246

Cela n’aura probablement pas échappé à la plupart des lecteurs : la carte Satellite V1 emploie quelques composants CMS. Cet article se propose de vous montrer qu’il ne sont pas particulièrement difficiles à souder à condition de choisir ceux qui conviennent à l’amateur et de disposer du matériel adéquat.

Les composants dits « traversants » sont les plus anciens mis sur le marché. Il s’agit de composants qui, pour être soudés sur le circuit imprimé nécessitent de percer ce dernier. Souder le composant consiste donc à passer ses broches par les trous prévus à cet effet et de le souder au verso de la carte.

Les composants CMS (Composants Montés en Surface) ou SMD en anglais (Surface Mounted Device) se soudent sur des emplacements situés sur une des faces de la carte.

Ces derniers sont réputés, à raison, plus difficiles à souder. Tout d’abord les composants traversant sont maintenus mécaniquement, on tord un peu les broches et le tour est joué, alors que les CMS ont une fâcheuse tendance à bouger tout seul et à ne pas se laisser faire. Les traversants sont de plus grande taille et donc plus faciles à manipuler alors que les CMS sont plus petits, voire minuscules.

Pourtant, il ne faut pas se faire des illusions, l’avenir est au CMS car ils sont plus faciles à implanter dans les processus industriels. Certes il subsistera toujours des composant traversants mais les nouveaux circuits intégrés sont généralement uniquement disponibles en CMS [1] et, lorsque le choix entre traversant et CMS existe, le composant en boîtier CMS est moins cher.

On peut aussi vouloir gagner de la place sur la carte ou bien bénéficier de la faciliter à implanter des CMS au verso de la carte et donc remplacer certains composants traversants par des CMS. C’est par exemple le cas des condensateurs de découplage [2] qui peuvent être implantés plus facilement en CMS qu’en traversant.

Quels composants CMS ?

De nombreuses tailles de boîtiers CMS existent et tous ne sont pas utilisables facilement. Certains boîtiers sont trop petits pour être manipulés sans les égarer ou bien leurs broches sont trop proches les unes des autres pour permettre un soudage aisé. Il ne s’agit pas ici de faire une liste exhaustive des composants CMS mais seulement de ceux que nous employons.

Les boîtiers de résistances, de condensateurs et de LED

16 tailles, exprimées sous forme d’un nombre, existent dans cette catégorie. Les tailles sont généralement données en unité impériale avec des irrégularités parce que sinon ça serait trop simple. Par exemple les boîtiers 1206 mesurent 0,125 (le 12) pouces x 0,06 pouces (le 06), soit 3,2 x 1,6 mm dans une unité qui nous parle. On laissera de côté les tailles rares que de toutes façons vous ne trouverez pratiquement pas dans le commerce pour se concentrer sur les modèles suivants :

DénominationLongueur (mm)Largeur (mm)Puissance pour les résistances (W)
201 0,6 0,3 1/16
402 1 0,5 1/16 à 1/8
603 1,6 0,8 1/16 à 1/3
805 2 1,25 1/8 à 1/2
1206 3,2 1,6 1/8 à 1
1210 3,2 2,5 1/2 à 1
2010 5 2,5 1/2 à 1
2512 6,3 3,2 1 à 3

L’encombrement sur une carte est plus important car il faut ajouter 1,5mm à la longueur pour tenir compte des pastilles et de la place pour souder. La première taille utilisable est la 805. En dessous cela tient de l’exercice de style. À noter que les résistances en 2512 permettent une dissipation thermique élevée pour un encombrement bien plus réduit que des résistances traversantes 2W dont le corps mesure plus de 10mm dans la longueur.

Condensateurs : les condensateurs de découplage classiques sont avantageusement remplacés par des 805. Ces derniers ont une épaisseur suffisante pour être manipulés assez facilement. Si il s’agit de découpler l’alimentation d’un composant traversant, le condensateur CMS prendra place au verso de la carte.

Résistances : ça se complique. Les résistances 805 ou 1206 sont fines et difficiles à manipuler. Le gain en encombrement, si on les compare aux résistances traversantes subminiatures en boîtier CFR-25-S (3,2mm de longueur, 1,8mm de diamètre), n’est pas significatif. En revanche, si la résistance doit dissiper, on utilisera avantageusement des 2010 ou 2512 qui amène un gain important par rapport à leur équivalent en traversant. Le marquage de la valeur est explicite dans la plupart des cas et on se reportera au site Positron Libre pour les détails. Sur la figure 1, la résistance en boîtier 2516 marquée 180 a une valeur de 18Ω (18 x 100) et la résistance en boîtier 1206 marquée 2R2 a une valeur de 2,2Ω.

Figure 1 : Quelques composants CMS
Figure 1 : Quelques composants CMS

Les boîtiers de diodes

Typiquement dans nos montages, nous utilisons deux ou trois types de diodes : diodes Schottky à faible seuil pour la protection de l’alimentation, diodes de redressement à seuil plus élevé pour la détection de présence. Ces deux types sont utilisés en boîtier DO41 pour passer 1A. Nous utilisons également des diodes Schottky faible puissance en boîtier DO35. Pour ces dernières, de taille comparable aux résistances subminiatures déjà citées, les boîtiers CMS n’apportent rien.

Pour les diodes de détection de présence, présentes en 4 exemplaires au moins, les boîtiers CMS permettent de les monter de part et d’autre de la carte et de réduire ainsi largement la surface utilisée. Les boîtiers pour les diodes en question sont les DO-214AC ou SMA. Ils sont légèrement moins encombrants qu’un DO41 et ne posent pas de difficultés, ni pour les manipuler, ni pour les souder.

Les régulateurs de tension

Les régulateurs de la série 1117 se présentent en boîtier SOT-223 et peuvent remplacer avantageusement les régulateurs de la série 78xx en boîtier TO220 lorsque la puissance dissipée n’est pas trop importante et que la tension d’entrée reste inférieure ou égale à 12V. Le gain en surface est très important. Les broches sont espacées de 2,3mm et le soudage ne présente pas de problème.

Les circuit intégrés numériques

Une multitude de boîtiers existent dans cette catégorie. Les plus faciles d’utilisation sont les boîtiers SO [3] ou SOIC [4] comme le MCP2517FD montré à droite de la figure 1 ou bien les ATtiny, des UL2803 ou des expandeurs d’E/S comme le MCP23017. L’espacement des broches est de 1,27mm et le soudage ne pose pas de problème.

Pour des circuits avec plus de broches, l’espacement des broches commence à poser quelques problèmes. C’est par exemple le cas des circuits en boîtiers SSOP [5] qui présentent en un espacement de 0,65mm qui deviennent difficile à souder, voire infaisable sans entrainement, car la soudure joint naturellement deux broches adjacentes. Les ATmega328 en boîtier TQFP32 [6], celui qui se trouve sur les Arduino Nano, présentent un espacement de 0,8mm et, si le geste doit être précis, le soudage se passe assez bien.

L’outillage

J’ai entendu, à de multiples reprises, mon grand-père dire « Il n’y a pas de mauvais outils, il n’y a que des mauvais ouvriers ». L’esprit critique et l’expérience me font maintenant dire que mon grand père se trompait à deux titres. Tout d’abord la citation correcte est « A mauvais ouvrier il n’y a pas de bons outils », ce qui a un sens différent, et, ensuite, de mauvais outils entre les mains d’un bon ouvrier ne lui permettront pas de faire un bon travail.

En matière de soudage de cartes électroniques, il est nécessaire de se munir d’un outillage adéquat.

Le fer à souder

Il vous faudra un fer à souder thermostaté afin de conserver une température de travail à peu près constante. Dans cette catégorie, on trouve une large gamme, du fer trouvé sur eBay aux différents modèles Weller. Pour ma part je possède un Weller qui a 40 ans d’âge avec une pane à effet curie [7]. Pour les CMS Il vous faudra également une pane fine de forme conique, plus fine que la pane qui est généralement livrée avec les fer. 0,3 à 0,5mm de diamètre permet une soudure précise. À titre indicatif, la figure 2 montre la pane de mon fer à côté d’un condensateur 805.

Figure 2 : comparaison de la taille de la pane du fer avec un condensateur CMS en boîtier 805
Figure 2 : comparaison de la taille de la pane du fer avec un condensateur CMS en boîtier 805

La soudure

Plus le composant est petit et plus la quantité de soudure à apporter est faible. Pour contrôler cette quantité, il est nécessaire d’employer du fil fin, typiquement de 0,5mm de diamètre. Vous ne pourrez pas faire du bon travail avec du fil de 1mm de diamètre.

Manipuler les composant

Pour saisir et maintenir les composants CMS, il faut dispose de brucelles fines auto-serrante en acier. La position naturelle de ces brucelles est la position fermée. En serrant avec les doigts, on les ouvre. Elle permettent de saisir le composant qui est ensuite maintenu sans effort comme montré à la figure 3.

Figure 3 : Condensateur en boîtier 805. La brucelle utilisé est une Bernstein 5-057 auto-serrante en inox
Figure 3 : Condensateur en boîtier 805. La brucelle utilisé est une Bernstein 5-057 auto-serrante en inox

Voir ce que l’on fait

La moyenne d’âge du modéliste ferroviaire n’étant pas des plus basses, nous avons tous des petits problèmes de vue. La solution est un lampe loupe qui permet d’obtenir à la fois un bon éclairage et une bonne vision sur le champ opératoire.

Le mode opératoire

J’ai expérimenté deux techniques. La première est celle que j’utilisais initialement et que j’ai ensuite abandonnée en faveur de la seconde qui m’a été suggérée par Dominique. Dans les deux cas, la technique consiste à réaliser la première soudure de manière à immobiliser le composant. Une fois que le composant est immobilisé, les autres broches se soudent classiquement.

Première technique

La première technique consiste à déposer un peu de soudure sur un des pads où doit venir se souder le composant. On pose ensuite le composant sur la carte et, en le saisissant avec les brucelles, on le glisse vers sa place. Il vient buter sur la soudure qui forme une sur-épaisseur. En fondant la soudure avec le fer, le composant est glissé à sa place définitive.

L’inconvénient de cette technique est que la soudure n’est pas aussi lisse et brillante que voulu. je privilégie maintenant la seconde technique qui est celle que Dominique emploie.

Seconde technique

La seconde technique consiste à préparer de petits tronçons de soudure de longueur approximative inférieure à 1mm. On dépose le composant et un tronçon de soudure sur la carte. Le composant est maintenu à sa place avec les brucelles et, en utilisant, par exemple, un cure-dent, on pousse le tronçon de soudure contre le composant. Une application du fer permet ensuite de réaliser la soudure.

Mise en application

Je vous propose une vidéo illustrant la seconde technique. Il s’agit ici de souder 3 composants : 2 condensateurs de découplage de 100nF en boîtier 805 et un contrôleur CAN MCP2517FD en boîtier SO14. La carte concernée est un shield CAN présenté à la figure 4.

Figure 4 : le Shield MCP2517
Figure 4 : le Shield MCP2517
Les trois composants concernés sont les deux condensateurs de découplage, C1 et C2, en boîtier 805 et le contrôleur CAN, IC1, en boîtier SO14.

Quand une carte utilise des composants CMS, on commence bien entendu par souder ceux-ci avant les composants traversants. En effet, le soudage s’effectuant normalement côté composant pour les CMS, la présence de composants de grande taille gène le fer. Commencer par les composants les moins hauts est d’ailleurs une règle générale pour faciliter le montage.

J’espère vous avoir convaincu que souder des CMS n’est pas si difficile que ça. Et puis, en tant que modélistes, les travaux délicats et précis ne devraient pas nous faire peur !

[1C’est par exemple le cas du contrôleur CAN Microchip MCP2517FD qui n’existe pas en boîtier DIP (Dual Inline Package)

[2Il s’agit d’un condensateur, généralement de valeur 100nF, que l’on place entre le VCC et le GND des circuits intégrés numériques afin de stabiliser la tension et fournir une réserve d’énergie proches pour encaisser les appels de courant

[3pour Small Outline.

[4pour Small Outline Integrated Circuits

[5Shrink Small Outline Package.

[6Thin Quad Flat Package.

[7L’aimantation de la pane dépend de la température. Quand la pane refroidit, elle colle à la cartouche chauffante. Une fois le seuil de température passé, la pane décolle et refroidit. Il s’agit donc d’un thermostat sans électronique.